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Peut-on critiquer le capitalisme ?

Peut-on critiquer le capitalisme ?, un ouvrage collectif de Kenza Aghouchy, Gilles Campagnolo, Philippe Chanial, Bernard Doray, etc. (La Dispute, coll. "Comptoir de la politique", janvier 2008, 186 p., 16 €)

Il faut lire ce petit essai collectif, paru en début d’année, aux éditions La Dispute. D’abord pour l’histoire mouvementée des textes qui le composent et qui, par sa brutalité, illustre à la perfection les difficultés pour une pensée critique, soucieuse de dégager des perspectives alternatives au système qui nous domine, de trouver des supports de diffusion grand public.

Initialement prévus pour former un numéro hors-série du Nouvel Observateur, les textes rassemblés dans cet essai ont été finalement écartés par la rédaction de l’hebdomadaire sans qu’aucune explication n’ait été donnée à leurs auteurs. Mais comme l’indique le préambule de cet ouvrage : « Il y a beau temps que cet organe de gauche s’est aligné sur ce que l’on appelle l’économie de marché (…) en choisissant d’inclure ou d’exclure, des auteurs, des textes, des revues, sur des critères de conformisme ».

Ensuite pour la question qu’il pose et que nous sommes nombreux à nous poser quand tout semble converger vers l’aplatissement de la pensée et le conformisme des idées.

Enfin pour la diversité des questions ou des thèmes qu’il aborde : les systèmes d’échange local, le marché : démocratie et totalitarisme, le travail flexible, la menace de l’exclusion bancaire…mais aussi les enjeux de l’opposition au capitalisme ou encore le capital comme transcendance des limites. A mi chemin entre sciences humaines, économie et philosophie. A cet égard, et dans cette perspective, les deux derniers textes sont particulièrement stimulants. Le premier parce qu’il traite de « Max Weber, Auschwitz et la rationalité capitaliste ». Reprenant les thèses de Z.Bauman, pour qui l’Holocauste aurait constitué un test exceptionnel des possibilités cachées de la société moderne, l’auteur (E.Traverso) considère que « les camps d’extermination interrogent le capitalisme en tant que système global d’organisation de la société, fondé sur le principe de la rationalité instrumentale ». L’inhumanité du capitalisme serait, non pas un accident, mais un de ses traits constitutifs, particulièrement frappant de nos jours avec la dévastation et la paupérisation grandissante d’une partie de la planète.

Dans le second texte intitulé « Sade : pour une critique de l’esprit du capitalisme », l’auteur (P.Vassort) s’interroge sur les analogies entre le corps sadien et le corps industriel. Corps sadien, d’un coté, assigné à la « jouissance absolue » via l’agencement d’un espace organisé pour la production industrielle des plaisirs ; corps industriel, de l’autre, dédié à la performance et à la recherche du plus grand rendement via l’organisation rationnelle de l’espace industriel qui « vise à faire disparaître les autres espaces, ceux de la liberté, de l’autonomie, ceux de la démocratie ».

Trois raisons, parmi tant d’autres, pour conseiller et lire les contributions de cet ouvrage.

Alain Coulombel
 

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