Accueil
Fondamentaux
Contributions
Organisation
Lettres
Notes de lecture
ecologie solidaire
 
 
Contributions
 
La réforme des collectivités territoriales
Le point le plus décrié du « rapport Balladur » de mars 2009 concerne le mode de scrutin concernant ces collectivités. Ce serait une grave erreur de sous estimer le deuxième volet de cette contre-réforme : la fin de la ruralité ayant pour conséquences la création d’immenses zones du territoire national « en voie de développement » (sic !).

A. Le mode de scrutin des Conseillers Territoriaux (CT)
Uninominal à un tour pour 80% des élu(e)s, sur des territoires non définis, et les 20% restant à la proportionnelle au niveau départemental (le seuil de 5% étant éliminatoire).
Les CT deviendraient en même temps Conseillers généraux et régionaux.
Certains journalistes parlent de « cantonalisation » des Régions.

Premier constat
A juste titre les organisations féministes dénoncent ce mode de scrutin comme anti-paritaire. En effet il est aisé de constater que seuls les scrutins de listes existants ont amélioré une situation encore peu fameuse (80% des CG sont masculins).

Deuxième constat : Un hold-up électoral
D’après un exemple tiré du blog du journaliste Laurent de Boissieu :
cas de 10 élus sur la base de 8 cantons ou territoires

Au scrutin majoritaire  3 Cent. 3Lib. 1 Nat. 1 Rép.
Sur les 20% 0 1 0 1
Total 3 Cent 4Lib 1Nat 2Rép
Soit en % des 10 30% 40% 10% 20%
 % réels 23,7 31,2 12,9 27,4

Il est aisé de constater la distorsion ainsi créée, un savant découpage pouvant encore accroître le nombre de parachutes dorés pour un parti majoritaire !

Troisième constat : en route vers le bi-partisme
Ce mode de scrutin force aux alliances d’entrée car il n’y a pas de second tour. Comment éviter que les deux grands partis à droite et à gauche deviennent hégémoniques dans leur propre camp ? Problème d’autant plus aigu que l’élimination des listes ayant fait moins de 5% favorise le parti le plus fort.
C’est un coup porté aux partis de « second rang » : PC, NPA, PG, Verts, Modem et des non-inscrits (pour les ex-CG).

B. Plus loin, toujours plus loin de ces gêneurs de citoyens

Pour contrer une certaine démagogie populiste du genre « tant mieux, ils seront moins nombreux ! » (2400 cantons contre 4000 actuellement), il importe d’expliquer que cette contre-réforme ne concernera pas que les élus.
Il y a, pour la population, un éloignement des centres de décision par transfert des compétences depuis les communes vers les métropoles ou les super-communes nouvelles.

Les métropoles (8 à 11)
Il s’agit d’un espace continu de plus de 450 000 habitants. Ce sont des collectivités de plein droit dotées de compétences générales. Elles remplacent de facto les départements, aidées en cela par des regroupements en communautés d’agglomération plus vastes que les communautés de communes.
Si l’on ajoute à ceci la suppression des compétences générales pour les régions, il est clair que celles-ci se font déshabiller, désarticuler. Elles ne resteront opérationnelles que sur un territoire appauvri, privé de moyens humains et financiers importants, ceux-ci étant captés par les métropoles.
Que devient la région PACA, à laquelle sera enlevée pratiquement Nice et Marseille ?

Les pôles métropolitains
Il semblerait (c’est un peu flou) que ceux-ci ressembleraient aux métropoles, en plus petit : plus de 200000 habitants.

Les villes nouvelles
Les communautés d’agglo et les communautés urbaines pourront prendre la qualité de villes et, comme il n’existe pas légalement de comités de quartiers élus, ce serait la disparition du peu de fédéralisme qui existe dans les divers types de communautés.

Les grands établissements
Par exemple, le Grand Paris. L’Etat prend possession d’un territoire, en privant les diverses collectivités locales de leurs prérogatives. Faute de contrôle électoral sur de « grands administrateurs », les habitants perdent tout pouvoir.
C’est du pur Napoléon III.

L’objectif de l’ensemble du dispositif semble clair : mettre en place des pôles de compétitivité concurrentiels, directement branchés sur le marché mondial et casser les structures électives qui peuvent se montrer trop rétives.
Certains, à gauche, ont l’air de s’accommoder de cette contre-réforme, en prenant les discours pour la réalité tel le « grand urbain » M. Destot (président de l’Association des grandes métropole françaises) ou la direction nationale des Verts croyant, par régionalisme naïf, que la disparition prévue des départements favoriserait la décentralisation.
Ce projet est contre-révolutionnaire (en regard de l’héritage de 1789) et vise, ni plus ni moins, à mettre fin à la République française par liquidation de ce qui reste des solidarités territoriales et l’affaiblissement des corps intermédiaires. Par contre, il consacre le renforcement du côté autoritaire de l’Etat et la délégation à la concurrence libérale pour l’aménagement du territoire.
Tout simplement, il s’agit de mettre en œuvre la désagrégation d’une France historique pour la rendre plus malléable aux appétits du capitalisme international.

Jean-Louis Peyron

Références
La revue Territoire n° 497
Politis n° 1077
 

Réalisé avec Spip